Après le « distribashing », y aurait-il aussi un « e-commerce bashing » ? Si l’on en croit une étude d’Oliver Wyman certaines idées reçues sur la logistique urbaine n’ont pas de réelles justifications.
5️⃣ idées reçues sur la logistique Urbaine
- La transition vers la livraison électrique doit être accélérée rapidement
- L’e-commerce est responsable des embouteillages en ville
- Acheter en ligne est moins écologique qu’acheter en magasin
- Les e-consommateurs sont sensibles à l’environnement
- Les camions doivent disparaître au profit des utilitaires
Les faits, rien que les faits et uniquement les faits. Dans son étude intitulée Légendes logistiques urbaines, Mehdi El Alami, partner chez Oliver Wyman, tient à dépassionner le débat qui accompagne le dernier kilomètre de livraison, tout en pointant les idées reçues sur le sujet. Embouteillages, désertification des centres-villes, pollution : les ventes en ligne seraient responsables de bien des maux, mais si on aligne les chiffres, la donne change. On a en tête les images de rues chinoises qui débordent de colis « mais, en France, la livraison de colis aux particuliers ne représente que 3 à 4 % du trafic urbain, précise Mehdi El Alami. Dans les zones urbaines, et encore plus dans les zones périurbaines, le bénéfice écologique de la livraison est clair, comparé à un achat réalisé en magasin pour lequel le consommateur s’est déplacé en voiture ».
Divergence et convergence d’intérêts
Autre enseignement, l’aspect écologique ne se retrouve pas complètement dans l’étude consommateur menée par Oliver Wyman. 28 % des acheteurs prennent en compte les aspects écologiques dans leur achat, mais ils regardent majoritairement la partie produit et non le volet transport. Et si on zoome sur les catégories de population, ce sont les seniors qui sont les plus écosensibles ! Mais une fois ce constat dressé, comment rendre la logistique urbaine plus efficace ? L’équation est complexe, car plusieurs intérêts rivalisent entre les villes, les consommateurs, les transporteurs, le commerce ou encore les grossistes. 2 idées convergent toutefois.
💡La première consiste à repenser l’offre. « Le secteur doit s’interroger sur les meilleurs moyens d’augmenter la valeur ajoutée de ses services, estime l’expert logistique. Les start-up de livraison B to C sont une source d’inspiration, avec la géolocalisation en temps réel du colis ou encore plus de flexibilité ou de précision pour l’organisation de la livraison. »
💡La deuxième consiste à favoriser l’accès des marchandises aux centres urbains. « Il y aura de plus en plus de contraintes restreignant l’accès aux centres-villes. Pas forcément via des péages, qui n’ont que marginalement fait baisser le trafic de marchandises à Londres, par exemple, pour un coût élevé, commente Mehdi El Alami, mais davantage par la mise en place de zones à émissions limitées, comme celle qui fait ses preuves à Berlin, et en accélérant le renouvellement de la flotte vers des véhicules plus propres. » Pas forcément électriques, même si Amazon a par exemple investi chez le constructeur Rivian pour concevoir une camionnette de livraison électrique taillée à 100 % pour ses besoins.
1️⃣ : la transition vers la livraison électrique doit être accélérée rapidement
Si les camionnettes électriques sont de plus en plus nombreuses, cette motorisation reste marginale car le prix d’achat est deux à trois fois plus élevé qu’en version thermique. Le volume de charge utile et l’autonomie sont encore jugés insatisfaisants. Côté porteurs, l’offre est quasi inexistante et les autonomies de maximum 130 km restent insuffisantes. Des alternatives apparaissent avec le gaz (liquéfié ou compressé) mais, là encore, l’addition est plus salée.
Note BSC : Le recours au véhicules BioGNV ou GNV permet désormais d’avoir une réponse objective en terme de coût mais c’est l’infrastructure qui manque. Il n’y a pas assez de pompe GNV et encore moins BioGNV. Concernant l’électrique, non seulement les constructeurs n’ont pas de réponses mais la charge utile et l’autonomie restent faibles pour les véhicules >3,5 t. Si on ajoute un hayon et d’avantage de batterie pour gagner en autonomie, on réduit très fortement la charge utile et donc la rentabilité.
2️⃣ : l’e-commerce est responsable des embouteillages en ville
Si l’e-commerce croît indéniablement, son rôle reste très limité dans la congestion des villes, même dans les grands centres urbains. Selon les estimations d’Oliver Wyman, un ménage reçoit en moyenne 15 colis par an et ces flux ne représentent que 3 % des mouvements des véhicules en ville. Le transport de personnes représente toujours la grande majorité des flux.
La vérité des chiffres
3️⃣ : acheter en ligne est moins écologique qu’acheter en magasin
Un achat web est souvent perçu comme plus polluant, alors que si l’on décortique les temps de transports, c’est en réalité le magasin qui affiche le bilan carbone le plus lourd. Il faut en effet additionner le temps de trafic du client à celui nécessaire pour approvisionner le magasin. Et avec l’optimisation des surfaces de vente et du stockage urbain, les distances parcourues ont été rallongées.
La vérité des chiffres
Temps de trafic nécessaire à un achat à Paris, en minutes
4️⃣ : les e-consommateurs sont sensibles à l’environnement
La part d’acheteurs écoconscients ne représente en fait que 28 %. Et cette population tient compte de l’aspect écologique du produit (65 %) plutôt que du transport (43 %). Par ailleurs, l’étude démontre que ce sont les seniors qui se révèlent les plus attentifs. Ainsi, 16 % des plus de 60 ans regardent systématiquement le volet écologique de leurs achats, alors que le taux chute à 4 % pour les 18-25 ans et les 26-35 ans.
La vérité des chiffres
5️⃣ : les camions doivent disparaître au profit des utilitaires
Le camion n’a pas la cote auprès des Français, victime de son imposant gabarit. Mais c’est justement son volume qui en fait le meilleur allié pour livrer. À la tonne transportée, un poids lourd pollue deux à trois fois moins qu’un véhicule utilitaire. Pour le remplacer, il faut sept véhicules légers. Et pour le bilan carbone, les technologies de filtrage sont plus efficaces sur les gros porteurs que sur les camionnettes. L’électrification des utilitaires sera un plus, mais actuellement, l’offre ne convient pas.
La vérité des chiffres
[ SOURCE ]
Bonjour,
Petite remarque sur le point numéro 5 : j’ai l’impression qu’il y a une confusion entre pollution et émissions de CO2. Le CO2 n’est pas à strictement parler un polluant, mais un gaz à effet de serre. La pollution est due aux émissions de particules fines, de NOx, … En ce sens, parler de « pollution » en gCO2/t.km me semble être incohérent. De même, je doute que les systèmes de filtrage mentionnés aient un quelconque impact sur le bilan carbone : à ma connaissance, il n’existe pas de système de captation de CO2 sur un véhicule (c’est déhà difficile sur un site industriel…), mais des filtres à particules (qui permettent donc de limiter les émissions de polluants, mais pas de CO2)
CO2 -> effet de serre -> dérèglement climatique (mondial)
particules fines et autres polluants -> détérioration de la qualité de l’air (locale) -> impact sanitaire direct