La taxe sur les livraisons e-commerce votée au Sénat récemment est un non sens évident !
La proposition de loi « Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs », dans laquelle figure la taxe sur les livraisons e-commerce, a été voté le 20 juin dernier par 288 voix pour zéro contre …
Intégralité de la proposition de loi « Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs » : http://www.senat.fr/petite-loi-ameli/2017-2018/549.html
L’article 27, propose la taxation des livraisons e-commerce de la façon suivante :
- Mise en place d’une taxe sur les livraisons e-commerce de biens à destination de toute personne physique ou morale non assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée et commandés par voie électronique
- La taxe est acquittée par le commerçant sur le site internet duquel le bien a été commandé. Elle est assise sur le prix du bien commandé et le nombre de kilomètres parcourus par le bien entre son dernier lieu de stockage et l’adresse de livraison finale à l’acheteur. Lorsque son dernier lieu de stockage est situé à l’étranger, la distance prise en compte est constituée du nombre de kilomètres parcourus par le bien entre son point d’entrée en France et l’adresse de livraison.
Le taux de la taxe est fixé à
1 % du prix du bien lorsque la distance parcourue entre son dernier lieu de stockage et l’adresse de livraison finale à l’acheteur est < 50 kilomètres
1,5 % lorsque cette distance est comprise entre 50 kilomètres et 80 kilomètres
2 % lorsque cette distance est > 80 kilomètres
Minimum forfaitaire de 1€ par livraison
NB : la première proposition de taxation était à l’origine un coût fixe de 0,50€ par kilomètre de livraison avec un minimum forfaitaire de 3€ par livraison ! Voir l’ineptie de cette proposition avec l’exemple simulé parc la FEVAD ici . Le montant de la taxe pour une commande passée sur un site internet à Lille par un client habitant Toulouse, pourrait atteindre 447,50 euros. Même en ne retenant que le montant minimum forfaitaire de la taxe, soit 3 euros par commande, le montant collecté auprès des sites internet atteindrait plus de 1,2 milliard d’euros, ce qui représenterait près de 5% du chiffre d’affaires total
- Le nombre de kilomètres parcourus est déclaré par le redevable au plus tard le premier jour ouvré de janvier de l’année d’imposition. La taxe est perçue par l’État au plus tard le dernier jour ouvré de mars de l’année suivante
Sont exonérées de la taxe
- les livraisons réalisées par le moyen de transports non consommateurs d’énergie fossile
- les livraisons des entreprises commerciales ou artisanales dont le CA annuel < 50 millions €
- les livraisons des entreprises dont l’activité principale est la vente de livres et qui disposent de points de vente physique
- les livraisons des magasins de producteurs commercialisant leurs produits dans le cadre d’un circuit court organisé à l’attention des consommateurs mentionnés à l’article L. 611‑8 du code rural et de la pêche maritime
Bon d’accord et maintenant ?
Cette taxe sera forcément répercutée sur l’acheteur
Il sera économiquement impossible pour l’e-commerçant d’assumer la globalité de cette taxe, les entreprises n’auront pas d’autre choix que de répercuter son montant sur les prix sur le client final. Côté consommateurs, cela représente donc une nouvelle taxe sur la consommation.
Fini les livraisons GRATUITE, avec cette nouvelle taxation celle-ci deviendra forcément payante !
Justifiée cette taxe sur les livraisons e-commerce ? … ou pas !
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- Le e-commerce ne représente que 9% du commerce de détails en France et environ 1% du commerce alimentaire si on exclut les drives, certes en progression constante depuis 10 ans mais l’ensemble reste faible au regard du reste. Cette taxe n’est pas justifiable sous couvert de la consommation on-line donc NON
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- lors des 20 dernières années, le commerce physique s’est étendu en France de 3% par an alors que le PIB a progressé de 1,3% (source : Jérôme Libeskind ici ). Il y a donc tout naturellement une sur-offre en commerce physique, qui a profité aux zones commerciales périphériques. Les élus ayant souvent privilégié l’étalement urbain des agglomérations, les centres villes se sont naturellement trouvés délaissés et abandonnés. Cette taxe n’est pas justifiable au regard de la sur-offre des commerces physiques, l’e-commerce n’est pas responsable de cela donc NON
- Évolution du cadre de vie, plus des 3/4 des français vivent en zone urbaine, l’espace urbain a grandit de prés de 20% en 10 ans. En quoi les nouveaux modes de consommation induis par l’évolution du cadre de vie sociétale des Français devraient justifier cette taxe, donc NON
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- La digitalisation (ou communément appelé l’uberisation) de nombreux secteurs (Assurance, agence de voyage, banque, …) et modèles économiques vont réduire le nombre de magasins physiques (comptoirs, agences, …). Ce n’est pas la aussi une problématique e-commerce mais simplement une évolution des modèles et des modes de consommations donc la aussi NON
- L’argument écologique qui vise à faire passer le e-commerce comme le responsable des congestions des villes (+66% de temps de trajets supplémentaires en période de pointe à Paris par exemple), de la saturation du réseau de transports, de l’augmentation de la pollution locale (émissions de CO2, bruit, accidentologie), …. Certes à l »échelle national, le transport quel qu’il soit utilise 20% du trafic motorisé, les livraisons occupent 1/3 de la voirie, et se trouverait à l’origine de 25% des émissions de gaz à effet de serre …). Est-ce que seul le e-commerce est responsable de cela ? La aussi la justification n’est pas tenable et ne doit pas rendre les livraisons e-commerce responsables de toutes les externalités négatives induites, donc NON
- J’ajouterai que sur le volet de l‘écoresponsabilité et de l’écologie, la massification et l’optimisation des livraisons réalisée par les transporteurs que ce soit pour les mises en points relais ou en consignes proche des adresses des destinataires (rappel : réseau global de + de 20 000 points de proximités en France sans compter les 15 000 points Poste), évitent bien souvent prés d’une livraison sur deux à domicile. Que les commandes on-line évitent autant de fois de se rendre individuellement en magasin, …
Ma réponse est donc NON, elle n’est pas justifiée
Conséquence d’une telle taxe ?
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- Favoriser les entreprises étrangères vs les entreprises implantées en FR ? Cibler les GAFA ? Sauf que cette taxe concerne tous les sites internet au-delà de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires et ceux qui vont être la cible seront en premier les PME qui créent de l’emploi sur l’ensemble du territoire et pas nécessairement en zone urbaine ou proche des pôles logistiques. Leurs marges sont déjà extrêmement faibles …
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- Que feront les habitants des zones rurales et des villes moyennes pour acheter des produits ? Ils continueront à se rendre dans les centres commerciaux situés en périphérie de la ville la plus proche… avec leur voiture. Il semble peu probable que les enseignes retourneront en centre ville et centre bourg.
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- Avantages données aux mégalopoles, par rapport aux zones rurales, comme Paris, Lyon et Lille, là où sont implantés les plus gros les pôles logistiques des majeurs du e-commerce. Les clients éloignés sont donc défavorisés ? Cette taxe est par conséquent plutôt un coup dur porté à la ruralité.
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- Avantages des grandes agglomérations qui ton déjà lancé des politiques de livraisons « propres » vs petites / moyennes villes et zones rurales ?
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Enfin des questions restent à éclaircir et des précisions doivent être données
Questions en vrac sur l’application de la taxe et son impact …
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- Comment interpréter « dernier lieu de stockage » ? Celui du transporteur ?
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- Modalité de calcule de la distance ? vol d’oiseau …?
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- Cette taxe est-t-elle applicable uniquement aux livraisons à domicile ? Qui du hors domicile ? Quid des livraisons e-commerce en entreprises (B2B) ?
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- Les importations sont-elles concernées ? Quid précisément des sociétés basées à l’étranger ? Des flux Crossborder c’est à dire transfrontalier des pays limitrophes ? Au global ça représente prés de 15% des flux e-commerce en FR…
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- Qui des marketplaces ?
- Quid du « click and collect » ?
- Quid des instances transporteurs (colis non livrés en première intention) ?
- Désynchronisation entre la commande et donc l’application de la taxe et l’exécution de la livraison. Complexité anticiper les modalités de calcules : le moyen de livraison, le nombre de kilomètre, … alors que la taxe s’appliquera lors du passage de la commande
Bref cette proposition de taxe sur les livraisons e-commerce doit encore passer devant l’Assemblée Nationale pour être définitivement adoptée. Gageons que les députés suivent l’avis défavorable émis par le gouvernement en amont du vote du Sénat, et que le plus grand nombre se rallie à la raison (ou le bon sens) lors de l’examen du texte.
A suivre …
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